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images qui bougent
13 mai 2008

2007- LUFF tout d'abord

Ainsi comme il a été promis, un retour sur les films de 2007 dont je n'ai pas eu le temps de parler, en commençant donc par l'édition 2007 du festival du film underground de Lausanne, et en espérant vous faire découvrir des perles rares qui vous donneront envie d'en savoir plus. ( les présentations des films sont issues du catalogue de présentation du LUFF, n'hésitez quand-même pas à aller voir le site : http://www.luff.ch/site/2007.html ) 'Viva' d'Anna Biller. viva1_03 'Dans une banlieue californienne des années 1970, Barbi, femme au foyer naïve négligée par son mari au look de poupée Ken, se fait entraîner par une amie un rien gironde dans une nouvelle vie pleine de turpitudes. Tel le chaperon rouge débarquant au pays du grand méchant loup, Barbi devient Viva et découvre avec stupeur les réalités de la libération sexuelle : communautés hippies, camps de nudistes, orgies, drogues (…) viva_020_374d0 (...) Avec Viva, Anna Biller nous offre un voyage dans le passé. Charme désuet, fringues post-hippie/pré-disco, tapisseries à vous coller une tumeur des yeux, tous les éléments sont réunis avec un remarquable souci du détail pour nous plonger dans un univers rétro des plus stupéfiant. Son inspiration première provient des films de sexploitation d’Hershell Gordon Lewis, de Doris Wishman et des Playboy de la fin des 60’s, mais y impose un discours féministe incluant des fantasmes purement féminins tout en se jouant des clichés sexuels. Cette comédie satirique aux allures bon enfant s’avère en réalité bien plus corrosive qu’elle en a l’air et porte un regard critique sur une période qu’on a aujourd’hui peut-être trop tendance à considérer avec une certaine légèreté.' viva2_03 Il est vrai que le film est un régal pour les yeux en terme de scénographie, pourtant essentiellement constitué de matériel de récupération. Il y a cependant quelque chose dans 'Viva' comme en réponse à un film comme 'Booggie nights' ( à moins que ce ne soit une biographie déguisée d'Yma Sumac) dans sa critique de l'industrie du cinéma pornographique, ou du systême hollywoodien en général, tous ceux dont on a jamais entendu parler , qui sont restés sur le carreau, que l'on retrouve ici dans les personnages tous imperméables, sur lequel tout glisse, on peut penser carrément aux 'Guignols de l'Info' quand les personnages se retrouvent pour l'apéritif et rient ensemble de la chance qu'ils ont finalement,bref une sorte de matérialisme assumé littéralement atroce; pour l'héroine, sa parenthèse s'avère discutable mais oubliée, sans conséquences. On peut très bien imaginer une prochaine fois, en se demandant si ce sera avec autant de chance. C'est effectivement cette légereté qui nous fait nous demander si les personnages, et surtout Viva a bien conscience de ce qui lui arrive, quand on voit ce qui n'échappe pas à d'autres de son entourage, ou est-elle une sorte de sainte qui croit en certaines vertus et certains principes qui heureusement la protègent de tout, faisant du film en fin de compte un véritable appel à la responsabilisation. pownoel 'Petit pow! pow! Noel ' de Robert Morin. 'La nuit de Noël, un homme muni de sa caméra se rend dans la chambre d’hôpital de son vieux père autiste. Mais la visite n’est pas de courtoisie. L’homme entame un véritable procès contre son géniteur au cours duquel il aborde des sujets parfois délicats, en particulier quand ceux-ci viennent d’un fils à son père, et déverse sa haine et ses rancoeurs en tentant de lui soutirer des aveux longtemps espérés. Mais la carcasse muette ne peut que regarder son accusateur d’un regard pesant, voire méprisant. Le vidéaste Robert Morin livre ici un film intimiste d’une sensibilité glaçante, et bien qu’il s’agisse d’une fiction, il est le reflet d’une relation père-fils bien réelle. Robert, le fils, n’a pour ainsi dire pas connu son père, un homme qui n’a jamais manifesté le moindre intérêt pour ses enfants. Suite à un accident, il est devenu handicapé. Et alors que Morin père n’avait jamais fait l’effort de passer du temps avec sa progéniture, voila que celle-ci se voit contrainte de lui consacrer le sien. Il aura fallu quarante années à Robert Morin pour se décider à approcher son père et lui poser les questions qui lui pesaient sur le cœur. Ce film perturbant en est le résultat : une oeuvre émotionnellement renversante. Robert Morin : vidéaste engagé actif depuis maintenant plus de 30 ans, Morin se fait connaître en tant que documentariste, puis se spécialise dans le docu-fiction. Ses sujets de prédilection sont les marginaux de toutes sortes (junkies, taulards, handicapés, avaleurs de sabre, culturistes, etc.) et les inégalités sociales. Ses méthodes sont cliniques, radicales, pour un résultat systématiquement grinçant. Il réalise son premier long, Tristesse modèle réduit, en 1987, s’en suit La Réception (1989), Requiem pour un beau sans cœur (1992), Windigo (1994), Yes Sir ! Madame (1994), Quiconque meurt meurt à douleur (1997), Le Nèg’(1997) et dernièrement Que Dieu bénisse l’Amérique (2006).' C'est pour ma part ma première approche du cinéma de Robert Morin, et j'espère qu'un jour le monde entier connaîtra le nom de Robert Morin. Véritable chef -d'oeuvre du film fait avec des bouts de ficelles revendiqué, qui se reprend , se corrige; à l'heure ou les docu-fictions commencent à revenir sur le devant des salles, Morin s'approprie le genre, et dans l'intimité qui le lie à son propos, laisse apparaître ses propres artifices : présenté comme un film improvisé , sa nature scénarisée sous toutes les coutures n'en devient que plus flagrante à chaque instant, parodiant son propre fil narratif de la recherche du père à un caprice de sal gamin vraiment psychosé. Au final, le message est passé tout de même; il ne faut pas craindre de dire. ci_fnc3_morin_1941 'Dante's Inferno' de Sean Mérédith 'Quand Dante se réveille avec la gueule de bois, il s’aperçoit rapidement que les choses ne tournent pas rond. Totalement perdu, autant physiquement que métaphoriquement, Dante aborde le premier passant qu’il croise avec l’espoir d’obtenir de l’aide. C’est ainsi qu’il rencontre Virgil, poète de la Rome antique qui parvient à le convaincre que s’il veut sauver sa peau, il doit le suivre dans les profondeurs de l’Enfer. Ainsi débute la traversée des neuf cercles de l’Enfer où personnages historiques, politiciens et pop stars subissent d’abominables sévices afin d’expier leurs péchés. Cette "mise à jour" du classique de Dante Alighieri a de quoi surprendre. Si la modernisation de ce récit du 14ème siècle n’a rien d’étonnant en soi, sa forme s’avère en revanche des plus inattendues puisque Sean Meredith opte pour un style d’animation propre au théâtre pour enfant du XIXe siècle où les personnages – des silhouettes en carton – sont animés à l’aide de baguettes par des techniciens hors champ. L’aspect enfantin de cette technique est rapidement gommé par les propos sarcastiques et parfois acerbes du film que l’on doit au scénario coécrit par Meredith, Paul Zaloom (connu pour ses satires politiques) et Sandow Birk, dessinateur engagé également en charge de l’univers visuel unique de Dante’s Inferno. Sean Meredith : après avoir terminé ses études en cinéma à Boston, remportant une distinction pour son film de fin d’étude, Sean Meredith s’associe déjà avec Paul Zaloom et Sandow Birk pour réaliser le "mockumentary" In Smog and Thunder en 2003, qui porte sur une guerre civile entre le sud et le nord de la Californie. Dante’s Inferno est son premier long métrage. ' Grand vainqueur dans la catégorie longs métrages, le film de Mérédith porte en lui tous les ingrédients du chef-d'oeuvre ( un mot qui revient souvent en ce moment, faites pas attention ) tant le réalisateur impressionne par la maturité avec laquelle il allie le fond et la forme. Mérédith utilise en effet un langage visuel qui rappelle les images d'Epinal; plus de doute une seule seconde, nous sommes dans le pamphlet et la critique,dans une démarche finalement similaire de celle de la série 'South Park' . Une réussite. dante__inf_1 dantes_inferno dantes_inferno2_03 qd_l_embryon Quand l'embryon part braconner ' de Koji Wakamatsu. 'Un homme séduit l'une de ses employées et l'emmène dans un appartement dépouillé. Le couple passe une nuit de tendresse qui ne fait que bien peu d'étincelles mais permet une évidente décontraction. Au réveil, lorsqu’il apprend que la fille s'apprête à retrouver un amant potentiel, les choses dégénèrent. Le film fit scandale au festival du film expérimental de Knokke, Belgique (où Roland Lethem su également se faire remarquer). Taxé de "sadique" et de "gratuit", Wakamatsu en conclut que les gens – et en particulier les européens – n’étaient pas prêts à comprendre cette illustration du combat entre la raison et l'endurance (la femme) face à la force et la folie (l’homme). Un duel réaliste dont l’issue espérée par l’auteur est que la raison l’emporte. Sincère, violent, pessimiste et touchant, Wakamatsu parvient au travers d'un film minimaliste (un décor, 3 acteurs) au contenu à priori misogyne, à signer une œuvre définitivement féministe.' qd_l_embryon Le scénario du film m'a immanquablement fait penser à l'intrigue de 'The collector' de William Wyler, adapté du roman de John Fowles; remake peut-être inavoué, non -revendiqué dont pourtant certaines scènes sont des retranspositions flagrantes, je ne sais pas si vous avez déjà essayé de faire produire un film de fiction dont l'auteur n'est pas encore tombé dans le domaine public, en tout cas le procédé qu'emploie Wakamatsu relève très fortement de l'hommage, si encore une fois, telle était bien son intention. L'abus sous toutes ses formes, vous verrez le film d'après, reste une des lignes conductrices de l'oeuvre de Wakamatsu, une composante de sa révolte, et le parallèle avec le livre de Fowles n'est pas si étonnant en soi, car c'est un livre tout simplement important. Le roman de Fowles et le film de Wakamatsu prennent tous deux comme postulat le fantasme de base masculin : la domination sexuelle totale,( la polémique sur certaines images que l'on peut trouver sur Internet prouve qu'on en a a pas tout à fait terminé, si jamais on a commencé ) et par le questionnement de l'humain par le rapport avec sa propre animalité qu'il soulève. C'est plus le statut tout-puissant de Dieu que l'on cherche ici ,davantage que le paradis perdu. Collector_sheet_A 1 ' Va, va, vierge violée pour la deuxième fois' ( ou ' Vierge violée cherche étudiant révolté ' ) de Koji Wakamatsu. 'Une adolescente se fait violer par une bande de jeunes sur le toit d'un immeuble tandis qu’un garçon timide au look de premier de classe assiste à la scène en silence. Le lendemain, suite à un rêve lui rappelant un viol antérieur, la jeune fille demande au garçon de la tuer. C'est sur cette trame apparemment simple que Wakamatsu réalise un film à la poésie nihiliste aussi touchante que désespérante. Sa vision pessimiste d'un Japon à la dérive en proie à la violence gratuite et à la désillusion d'une jeunesse en perdition est racontée d'une manière froide et détachée, décuplant ainsi l’impact des séquences marquantes, le point d’orgue étant une orgie totalement dépravée. Tourné en quatre jours sur le toit de l'immeuble abritant sa propre compagnie de production et rythmé par des compositions allant du rock psychédélique au free jazz, Va, va, vierge pour la deuxième fois est un film aussi fascinant qu’il est effrayant.' 6 Une présentation de Koji Wakamatsu, toujours issue du catalogue LUFF : ' Quand le yakuza Koji Wakamatsu est jeté en prison alors qu’il n’est âgé que d’une vingtaine d’années, il réalise à quel point l’autorité du pouvoir est exercée de façon répressive et brutale. A la fin de sa peine, il décide de dénoncer ces abus par le biais du cinéma, non sans avoir préalablement écrit un livre sur son aventure carcérale. En 1959, il entame une carrière à la télévision avant de réaliser quatre ans plus tard ses premiers films pour le cinéma. Il est alors libre de filmer ce que bon lui semble à condition d’y injecter un maximum de scènes de sexe et de violence. C’est donc par stratégie qu’il mène une carrière remarquée dans le "pinku-eiga" (cinéma érotique japonais), dans le but de réaliser les films auxquels il tient. Mais il s’aperçoit que l’érotisme est primordiale au développement de son discours politique et que ce qui n’était au départ qu’une obligation est devenu une nécessité. En 1965, il fonde sa propre maison de production, Wakamatsu Productions, et réalise L’Amour derrière les murs qui, non seulement se retrouve sélectionné au festival de Berlin cette année là, mais se voit en plus nominé pour la plus haute récompense, ce quiprovoqua une indignation quasi générale. Dès lors, sa caméra devient une arme politique offensive dénonçant les travers d’un gouvernement hypocrite et il s’impose en tant que porte-parole d’une jeunesse en proie à une forte crise identitaire, comme en témoigne Sex Jack (1970). Ses films, tournés de manière frénétique (il en réalise une dizaine par an), d’apparence simpliste dans leur mise en scène dépouillée qui rappelle celle de Jean-Luc Godard mais dont les excès de sexe et de brutalité ramènent au cinéma d'exploitation, sont de virulents manifestes anarchistes qui font encore aujourd’hui grincer des dents les autorités nipponnes. Ses convictions politiques qui lui valent d'ailleurs d’être toujours interdit sur le sol américain. En 1971, Wakamatsu obtient la reconnaissance internationale à la Quinzaine des réalisateurs du festival de Cannes et ralentit en même temps son rythme de production. Cinq ans plus tard, il rejoint Nagisa Oshima qui fait appel à lui comme directeur de production de L’Empire des sens. Aujourd’hui, à 71 ans, Koji Wakamatsu continue de tourner mais ses films se sont assagis et se posent principalement comme les témoins d’un Japon désillusionné.' b9fd6a6f4d « Si mes films sont politiques, c’est parce que je ne me décide pas à aller moi-même lancer des grenades » K. Wakamatsu in Sex Stars System n°14, Juin 1976
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