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images qui bougent
16 mai 2009

'voilà qui est intéressant...'

millenium_1

Le temps d'apprendre l'existence de la série culte de Stieg Larsson - c'était il y a un an déjà - que dans la foulée on m'annonce une adaptation ciné. Le temps d'y réfléchir vraiment et nous voilà déjà le jour de la deuxième ou troisième semaine d'exploitation en salles. Je suis donc allé voir 'Millénium: les hommes qui haissaient les femmes' ( aka 'The girl with the dragon tattoo what else ') sans avoir lu un seul des romans au préalable, et avant de continuer plus avant car ' ce qui suit révèle des moments clés de l'intrigue', je vous dirais juste ceci : allez voir ce film, ce n'est peut-être pas le polar du siècle, mais c'est pas un des plus cons. Bien que l'on soit plutôt gâtés visuellement au niveau de la photo et des éclairages, du cadre rapproché afin de bien voir les personnages cligner des yeux et de ne pas nous éloigner de leur 'temps de recherches', l'ouverture et la fermeture du métrage ( à chaques fois le héros dans les locaux de son journal ) font qu'il y a malgré tout une consistante impression de téléfilm qui vous colle à la rétine. Pour le reste, le film m'a plu presque autant qu'il m'a déçu mais cela aura au moins eu le mérite de générer une réflexion, aussi revenez quand vous aurez le film, je serais ravi de lire votre opinion, car nous allons maintenant entrer un peu plus dans les détails :

- le début, ainsi que l'intrigue en général par exemple ( je vais y arriver ), ou l'on a l'impression d'être au commencement d'un roman de Paul Auster ( lui aussi publié chez Actes-Sud, mais encore une fois je ne veux froisser personne ) mais en moins bien, à savoir un personnage sorti de son quotidien pour effectuer un travail de commande un peu extraordinaire, fruit en général de la lubie d'une tierce personne en général assez nantie, ce qui enlève systématiquement du récit les impondérables financiers.
Cela pourrait n'être qu'une ressemblance fortuite mais la comparaison ne s'arrête pas là, et c'est là que ça devient intéressant, car la ressemblance devient pertinamment thématique : peu à peu chez Auster le réel alentour disparaît et l'histoire devient une espèce de cauchemar personnel pour le héros : UN TRUC QUI LUI ARRIVE ET QUI N'ARRIVE QU'A LUI SEUL. Et c'est un point qui selon mon humble avis fait la particularité et la force des livres d'Auster. Le film 'Millénium' s'appuie sur les mêmes leviers pour expliciter son propos : vous je ne sais pas mais ça m'a fait un peu bizarre d'être confronté au rapport de Lise-Beth avec son tuteur au bout de la première demi-heure. La comparaison avec Paul Auster s'arrête là - ses personnages sont la plupart du temps masculins et il n'a que je sache jamais abordé aussi frontalement le thême de l'abus. De mon côté, toujours en salle, j'ai attendu assez longtemps ce qui pouvait légitimer une pareille scène, et j'ai fini par trouver quelques raisons -sous vos applaudissements - qui vont du franchement démago au très pertinent :
- le fait d'insister autant sur le personnage de Lise-Beth corrobore la possibilité qu'il n'y aie non pas un ( le journaliste ) mais deux héros. Si cette notion est bien indiquée ( narration en parallèle ) je ne l'ai pas vraiment trouvé bien appuyée par la suite ( si ce n'est que le final laisse entendre que cette relation entre les deux personnages prendra encore de l'importance et s'avère le véritable sujet ) mais sa présence ne se justifie que pour répondre à des questions pratiques, si on en apprend autant sur elle c'est pour comprendre qu'elle est en fait le complément nécessaire au héros masculin pour résoudre l'enquête. Second point intéressant, la scène avec le tuteur que le spectateur a vue mais que le héros ignore font dire à Lise-Beth les paroles qui donnent son titre au film ( hein pas mal ) mais surtout pose la première frontière entre les personnages en ce qui concerne la compréhension des crimes même et la question du jugement; le premier point n'intéresse pas le journaliste et à ces clignements des yeux fatigués, il ne comprend pas pourquoi L.B n'a rien fait pour sauver le meurtrier, ce qui laisse entendre qu'il aurait préféré que celui-ci soit plutôt jugé.
Ces grosses ficelles apparentes ne soulignent que d'autant mieux la précarité de la rencontre entre les deux héros : c'est parce que L-B connaît la personnalité de Michael - et son travail- à fond et que celui-ci lui inspire un tant soit peu de respect qu'elle se décide à franchir le pas et l'aider dans ses recherches, alors que sans ces critères, logiquement tout devrait les séparer.

millenium_duo

C'est quand même beau.
D'ailleurs, ça me fait penser que si il y a une lectrice qui se trouve parmi vous amis lecteurs, alors je me dois de l'avertir dès à présent : il y a bien sûr le risque qu'elle soit séduite par la clarté et la pertinence qui règnent sur ces pages depuis quasiment leur ouverture, et aussi afin de ne pas perdre cela, afin que les sentiments ne viennent pas brouiller une quête beaucoup plus noble de recherche de la Vérité, alors surtout surtout IL FAUT ME PROMETTRE DE NE PAS TOMBER AMOUREUSE... il s'agit d'être forte, je sais ce ne sera pas facile mais c'est préférable car ce serait terrible et ça nous ferait du mal à tous les deux.

Ceci étant dit revenons à nos grosses ficelles apparentes car elles contibuent à donner sa singularité à 'Millénium' - jusque là ça va je crois que j'ai tout bon : les films policiers en général, avec des tueurs en série, insistent bien volontiers sur le passage à l'acte, le meurtre, suffisamment pour rapprocher celui-ci du viol pour peu qu'il y aie quelque torture. Ce dernier le précède même souvent et logiquement, presque comme de bien entendu, faisant de celui-ci l'étape attendue avant la mort. Peu de films insistent sur le fait que cela peut-être au contraire un élément, une constituante de la vie. 'Millénium' rompt définitivement avec la possibilité d'une complaisance malsaine - si cela existe encore - entre le spectateur et ce qu'il regarde, faisant de celui-ci un complice ou encore lui livrant quelques sensations à bons marchés, car disons que dans tout film policier/ thriller / polar qui se respecte, le fait que la victime soit torturée et violée avant d'être tuée fait partie du jeu et on se focalise moins sur la souffrance de celle-ci que sur l'impunité du bourreau- pensons aux quatre scélérats des '120 jours' de Pasolini. Ici le crime n'a pas non plus été commis par intérêt ou par accident mais s'avère la seule issue par rapport à l'oppression que représente la violence domestique, et on voit comment celle-ci détermine une personnalité ( : c'est ce qui obligera Harriet a trouver une autre vie, c'est ce qui fait que L.B rend coup pour coup ) sans laisser vraiment d'alternative, sinon c'est le même cauchemar qui continue.

festen000
( ci-contre : 'Festen' de Thomas Vinterberg )

C' est pourquoi je rapprocherais volontiers ' Millénium' du film 'Festen' pour la pertinence avec lesquels ils abordent le même sujet, à propos duquel on est encore en règle générale un peu faible à trouver des solutions ou à prévenir, alors que c'est un problème de société absolument majeur. Un des éléments particuliers de 'Millénium' semble être le personnage de Lise-Beth et son passé mystèrieux, c'est cela qui oriente tout le film sur un propos différent en ce qui concerne la violence par rapport à la majorité des films de genre ( je n'ai pas vu le récent 'Martyrs' cependant. c'est donc un peu gênant pour généraliser ) - qui disent pas vraiment ouvertement 'nonon c'est pas bien' puisqu'ils se chargent quand même de produire quelque chose 'à sensations'. Le final rappellerait presque, en un peu décalée, la dynamique entre les personnages de Thomas Harris, Hannibal Lecter et Clarice, et me donnerait assez envie de savoir ou les autres films vont nous mener exactement.

En tout cas il fallait bien un contenu d'une telle ampleur pour m'empêcher de crier à l'arnaque : le postulat de base, le vieux monsieur qui interprète mal les cadeaux qu'il reçoit n'est destiné qu'à nous faire admettre de façon un rien démago la possibilité d'un assassin..et j'attends quand même un peu mieux de la part d'un livre culte. Si le vieux Monsieur avait engagé Michael pour retrouver Harriet parce qu'il croit envers et contre tout qu'elle est toujours vivante après toutes ces années, on aurait pu rebondir de la même façon sur la piste des meurtres en série. Ne parlons pas non plus de l'enquête ou finalement l'un des révélateurs est non pas le zoom à l'intérieur de l'image comme dans le 'Blade runner' de Ridley Scott mais l'enchaînement des clichés qui permet de restituer la continuité des évènements. Comme quoi il serait vraiment temps de faire des excuses aux années 80, mais bon ce n'est pas non plus le pire hommage quand on connaît la teneur du film de Scott et l'importance qu'il donne à la notion de pardon sur laquelle 'Millénium' se positionne également à travers le personnage de L.B.

L'une des principales références contemporaines du film noir restera pour moi et pour longtemps le 'Seven' de David Fincher, mais je suis bien forcé d'admettre que ce récent 'Millénium' -qui n'a rien des qualités graphiques du film de Fincher loin de là - arrive pas très très loin derrière malgré tout ce que je peux lui reprocher, et je pense avoir ressenti quelque chose d'assez similaire, dans le bon sens, à ce qu' a pu éprouver quelqu'un qui ne connaît pas la b.d 'Watchmen' mais qui a vu le film de Zack Snyder.

Et par contre , s'il y a une adaptation d'un autre livre culte que j'attends vraiment au cinéma , c'est bien celle-ci :

9782207254417

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Commentaires
S
D'après ce que j'ai entendu de mon côté, le film est assez fidèle au roman. Et d'ailleurs je n'arrête pas de me dire que s'il avait pu faire une petite entorse à son adaptation ça aurait p-ê pas été plus mal :<br /> garder les scènes de Lise-Beth avec son tuteur pour le deuxième volet par exemple...<br /> Mais bon, c'est vrai que la raison voudrait que je me fasse ma propre idée avec les romans, je suis un inconditionnel de James Elroy parexemple et je n'échangerais pas le plaisir de la lecture contre un visionnage simple.
E
Je n'ai pas encore vu millenium (bien que clash l'ait chroniqué sur mon blog): j'ai lu un peu tout sur ce film. A mon avis, mieux vaut lire le roman après avoir vu le film.
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