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images qui bougent
11 juin 2009

...bientôt fini ?

trois

‘Dans une usine de fabrication de verre, Pierre (Gérald Laroche) est un ouvrier dont la vie est parfaitement réglée entre son travail, sa femme, son fils et sa petite maison. Il décide de passer de service de jour en service de nuit. Dans sa nouvelle équipe, il tombe sur Fred (Marc Barbé ), un homme charismatique et violent. Celui-ci dit bien fort que Pierre est son ami. En réalité, il en a fait son souffre douleur et ne rate pas une occasion de le brimer ou de l'humilier. Tout cela ne pourrait être qu'une mauvaise blague. Mais le harcèlement va se poursuivre inlassablement.

Inspiré d'un fait réel, ce drame sur le harcèlement moral subi au sein des entreprises a été présenté dans la section Panorama au Festival de Berlin 2001. Le Prix 2001 de la Fondation Lucien Barrière "De l'écrit... à l'écran et à la scène" a été attribué à l'auteur-réalisateur Philippe Le Guay. ’ ( sources : Allo Ciné )

Je n’aime pas beaucoup les étiquettes mais j’aurais tendance à qualifier ‘Trois huit’ comme étant un des plus beaux exemples du ‘cinéma-réalité’ début XXIe, et encore, je dis ça pour orienter le débat : on est bel et bien dans le cinéma tout court bien sûr. On est peut-être encore loin de la maestria des Frères Dardennes, en tout cas on peut saluer bien haut toute l’équipe . Ne vous y trompez pas pourtant, nulle question ici de décalage horaire. Et c’est d’ailleurs quelque peu dommage d’avoir écarté cette notion : le film pose relativement ses scènes et son contenu, à tel point qu’on est de temps à autres un peu au ‘petit pas’; avec la fatigue et le décalage la question du harcèlement gagnerait encore en crédibilité, si on la vivait au moins pour un instant au pas de course. Ce n’est pas un mal cependant si le réalisateur temporise les échanges, car avec tous les paramètres, une réplique de ci de là suffit à donner d’un seul coup d’un seul une autre ampleur aux enjeux du film.

‘Trois huit’ s’attarde davantage sur l’antagonisme entre les deux personnages principaux avec acuité : d’un côté le persécuteur apparemment ‘parce qu’il peut le faire’ et dont les raisons s’affinent peu à peu, de l’autre le persécuté qui n’est pas en reste lui-même de profondeur, tellement refuser le conflit semble ancré dans sa nature. On est tous d’accord c’est très beau mais avec ceci, et malgré une certaine osmose d’avec la nature tout court, on finit par percevoir surtout une certaine propension au conformisme : -travailler-de-nuit-pour gagner-plus-pour-finir-la-maison-pour-inviter-les-voisins. D’un autre côté qui sait si ce n’est pas lui qui aurait raison, en terme vraiment de philosophie ? Ou se pourrait-il que tout simplement il n'ai même pas idée qu'il y aurait peut-être une autre façon d'exister que se tuer à la tâche et se couper de plus en plus de son entourage.

Le film cache plutôt bien son jeu, recélant une densité de fond assez impressionante, par le seul artifice de se présenter comme étant un simple fragment de vie dans la trajectoire de ses personnages. Il bénéficie d’une écriture assez boulonnée, servie par des acteurs tous au diapason ; s’attardant sur des thèmes ou l’intelligensia de la profession s’arrête à peine, concédant ici et là quelques routines de comédien, car la décence demande de ne pas s’apesantir sur le sujet. J’ai failli dire : ‘genre Arnaud Despleschin’, à cause d’une scène de ‘Un conte de Noel’ qui m’avait prodigieusement frappé par une espèce de pédanterie généralisée de la part de toute l’équipe –celle de la discusion sur la compatibilité nécessaire à la greffe de Catherine Deneuve – et m’avait fait réfléchir sur la propension du cinéma français à survoler ses sujets . Dieu sait si je les aime tous pourtant. Bon en plus ce que je dis c’est pas vrai, car Despleschin laisse rarement le spectateur en rade. Avec lui on surmonte, il n’y a qu’à repenser à Melvil Poupaud derrière ses platines dans ce même métrage. Mettons que je n’ai rien dit.

En tout cas au niveau de la demande en terme de réalisme, en France, on aime pas trop réfléchir. On retrouve dans ‘Trois huit’ dans un rôle secondaire Alexandre Carrière, héros du fulgurant ‘Chacun pour soi’ de Bruno Bontzolakis ( 1998 ) qui poussait un cran plus loin à la fois le contexte de son récit –un cadre limite bas-seuil- et surtout l’autarcie de ce contexte. Autant vous dire que c’est pas les diplômes ni même un petit Gaston Lagaffe qui suintaient des murs, et dans ce genre d’ouverture certaines questions ont vite fait de trouver leurs réponses. On fait plus que de frôler ici une certaine dramaturgie. Le film est à la fois si chargé et si puissant qu’il en est quasiment dangereux : c’est véritablement à se tirer une balle en sortant. J'aurai rarement vu un film aborder ce ‘fameux aspect de la réalité qui n’existe pas’ et dont Paul Mc Cartney a fait une B.O de James Bond de façon aussi frontale, ex-aequo avec le 'Requiem for a dream' de Darren Arronofsky, tellement ici y a pas d'issues de secours non plus. Les films de Bontzolakis ( le précédent : ‘Famille je vous hais’ –pas vu ) n’ont pas pourrait-on dire tout à fait trouvés leur audience –peut-être trop ‘déprimants’, mais j’espère très sincérement que ses films bénéficieront d’une seconde chance sur le petit écran, assez rapidement, que le public réalise quel grand cinéaste nous avons là.

chacun_pour_soi

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