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images qui bougent
2 septembre 2009

Ce cinéma vous manque-t-il ? 'Body double' de Brian De Palma

bodydoublebig

A moi oui.
Terriblement.
J’ai pu citer Martin Scorsese parmi les réalisateurs qui m’ont ouvert les portes du cinéma, mais il y a également Brian De Palma. Pour comprendre cela, il faut se replonger dans ses propres souvenirs d’enfance pour percevoir la même émulation qui précède une découverte. J’ai d’ailleurs encore tendance à appeler les films d’auteurs les ‘films d’adultes’ pour définir ceux qui vous racontent un peu moins de bobards sur le déroulement de la vie, qui montrent des choses un peu différamment , jusqu’alors vous pensiez n’être que le seul à trouver hypocrites les gens qui pleurent un peu trop aux enterrements. Plus concrètement, je suis resté longtemps captivé par le pitch de certains films avant d’avoir pu les visionner des années plus tard  ( ‘Dr Folamour’, ‘Network’, ‘On achève bien les chevaux’,…) tandis que d’autres me  sont tombés dessus par hasard ( ‘Marathon man’) ce qui fût le cas bizarrement pour quasi tous les De Palma, qui mis à part ‘Scarface’ que j’ai dû voir un nombre incalculable de fois, s’étaient en quelques sortes amalgamés les uns aux autres pour ne représenter plus qu’un mélange trouble d’attraction / répulsion. Autre chose étonnante, c’est l’un des domaines ou ses films de la première heure excellent littéralement.

Tintin ( vous verrez, la référence vestimentaire devient à un moment donné immanquable, interprété par Craig Wasson ) est acteur de cinéma et se trouve frappé en plein tournage d’une crise de claustrophobie aigüe. Le réal lui dit, cool pas de problèmes Tintin , t’as qu’à prendre ton après-midi. Tout content, Tintin retourne chez lui mais surprend hélas sa petite amie au lit avec un autre homme ( scène à laquelle David Lynch rend un magnifique hommage dans ‘ Mulholland drive’ ) du coup, il se barre à l’autre bout des Etats-Unis reprendre des cours, histoire de surmonter son petit problème professionnel. Pour apprendre plus tard qu’il a été remplacé sur le film ou il avait le rôle principal. Alors plus ou moins au trente-sixième dessous, une connaissance rencontrée au cours de récentes auditions lui propose de loger dans l’appartement ( le palace ) qu’il devait lui-même garder pour quelqu’un. C’est pas compliqué, il faut juste arroser les plantes, et tous les soirs à la même heure, la voisine d’en face fait son show. Tintin bien sûr est ravi, mais-son-bonheur-sera-de-courte -durée-car-il-va-bientôt-basculer-dans-une-spirale-incontrôlable-de-meurtres-et-de-faux-semblants…

Tintin oui, absolument.

Et c’est bien là notre sujet. Le titre en français, littéralement signifierait ‘Doublure’, et on ne pourrait pas mieux dire. La  récit se situe déjà lui-même dans les coulisses de la grande machine à artifices qu’est le cinéma,  et la substitution est au cœur même de l’intrigue, si ce n’est que nous avons quittés les sentiers du divertissement. C’est quasi-notoire, De Palma renoue ici magnifiquement avec les grands éléments hitchcockiens, notamment le voyeurisme ( ‘ Fenêtre sur cour’), les phobies et, encore une fois, le remplacement ( ‘Sueurs froides’ ) si ce n’est qu’il retranspose impeccablement le tout de nos jours, dans les années 80, en plein essor du porno par exemple. De Palma va en effet un cran plus loin en actualisant justement ces thèmes, en allant là ou le maître n’a fait que suggérer, en s’aventurant plus nettement dans les sentiers de la perversion. Le héros hitchcockien, s’il possède un talon d’Achille, n’en reste pas moins, un héros. Le héros De Palmien lui, s’il n’est pas un héros, eh bien c’est un pervers. Passif, mais pervers quand même. Quand il ne va pas au bout de ses idées, quand il reste à subir les évènements, eh bien ceux-ci se retournent invariablement contre lui - je pense à la première moitié de la scène de filature, ainsi qu’à l’interrogatoire. Au risque de spollier un peu trop des éléments du récit, je vous conseillerais toutefois, pour plus tard, la page de Wikipédia en français ( pour une fois ) sur le film, ou il est très bien décrypté.

Chose que je trouve assez surprenante, à quelques exceptions près, le thême de la machination semble quelque peu laissé à l'abandon. On parle plus d'infiltrations, de prises d'otages, bref que du clinquant, davantage que de complots à base de mensonges patients et appropriés pour faire de quelqu'un un bouc émissaire, ce qui à l'époque d'Hitchcock jusque tard dans les années 90 était soit monnaie courante, soit au pire pirouette scénaristique -faute de scénario consistant. Dans une société qui cultive l'esprit de compétition, pousser des gens au suicide, ou les faire tomber socialement, ça  ' n'existe pas', ça ' ne se fait pas' ou 'ça ne se fait plus'. Mais je ne voudrais pas sonner comme un vieux réac radoteur, je laisse ça de côté pour le prochain article. Malgré une filliation classique, le film lorgne de façon jubilatoire vers la série B, ou le giallo, et ça c'est très chouette, j'ai pas peur de le dire non plus. La scène d’affrontement finale de ‘Body double’ avait eu sur moi un impact certain, qui s’est avéré moins marquant avec le passage des années ( envoyez vos dons ), ce qui me permet d’avoir un regard plus global sur le film, qui pour moi stigmatise le mieux ( aux côtés de ‘Blade runner’ ) la quintescence et les ambitions des années 80; un film complètement dans son temps, affranchi des références du passé, terriblement catharcique et ainsi, aussi, terriblement généreux.

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