30 décembre 2008
Sorties de cartons
Ce n'est jamais vraiment une perte de temps que de lire un roman de Graham Greene ( ' Orient-express'; ' Tueur à gages' ), on est rarement déçu, en terme d'expérience littéraire. Le style et la construction restent d'une rigueur implacable d'un bout à l'autre, verrouillés, boulonnés, sans le moindre signe de relâchement, à l'image de ce qu'ils racontent d'ailleurs : quelque chose conçu au millimètre. Le moindre signe de relâchement et ça explose, qu'est-ce qu'on nous dis. C'est au détour des rouages de cette machinerie sans le moindre grincement qu'apparaît l'art du romancier - influencé par l'écriture de François Mauriac nous dit-on - dans sa façon de placer un trait de caractère, ou une toute autre information inattendue.
Alors de quoi ça parle, je vous donne un indice :
ça commence sur un bateau...
' Très loin, en ville, nous entendîmes des coups de feu.
— On tue quelqu'un, dis-je.
— Tu ne sais donc pas ?
Deux nouveaux coups claquèrent.
— Je veux parler des exécutions.
— Non. Il y a plusieurs jours que Petit Pierre n'est pas monté. Joseph a disparu. Je suis privé de nouvelles.
— En représailles pour l'attaque du poste de police, ils ont fait sortir deux hommes de prison pour les fusiller dans le cimetière.
— Dans le noir ?
— C'est plus impressionnant. Ils ont installé des lampes à arc et une caméra de télévision. Tous les enfants des écoles doivent y assister. Ordre de Papa Doc.
— Alors il faut que tu laisses la foule des assistants se dissiper, dis-je.
— Oui. C'est tout ce que cela signifie pour nous. Ce ne sont pas nos affaires.
— Non ; nous n'aurions pas fait de très bons rebelles, toi et moi.
— Je ne crois pas que Joseph y réussira non plus. Avec sa hanche estropiée.
— Ou Philippot sans son Bren. Je me demande s'il transporte Baudelaire dans sa poche à portefeuille, pour arrêter les balles.
— Ne sois pas trop sévère pour moi alors, dit-elle, parce que je suis allemande et parce que les Allemands n'ont rien fait. '
( pp. 353-354 )
Je terminerais l'année un peu moins à la ramasse, et c'est bien l'essentiel de mes pré-occupations, puisque je viens de découvrir un nouvel auteur de science-fiction, et pas des moindres encore une fois : Philippe José Farmer, un autre pionnier puisqu'il s'est attaché dès son premier roman ( 'The lovers' - traduit chez Folio sous le titre 'Les amants étrangers' ) à amener dans la science-fiction une dimension nouvelle qu'on ne lui connaissait pas, le cul ladies and gentlemen, the sexuality attention ne vous y trompez pas je ne me moque pas. Farmer fera son fer de lance tout au long de sa carrière à mettre en scène une écriture pétrie de fantasmes, débridée et sans tabous, et à 'Images qui bougent' on ne pouvait que se demander ce que ça raconte.
La bibliographie de l'auteur s'avère assez impressionnante, et apparemment à peine le quart aurait été traduite.
' Une bourrée pastorale' ( ' Flesh' -1968 ) pour commencer donc, ou après un voyage interstellaire de huit cent ans à la recherche de planètes potentiellement coloni...vierges, le vaisseau spatial ' Terra' et son équipage, commandé par Peter Stagg, découvrent que bien des choses sur Terre ont changées. La dernière apocalypse a laissée la planète un peu dévastée, et la nouvelle civilisation s'est quelque peu fondée sur un culte de la fécondité, une société plus proche de la Nature, à l'écart de la science et de la technologie, comme par rancune inconsciente...Tandis que le commandant est séparé de son équipage , on lui apprend qu'il a été choisi comme le nouvel avatar du Héros Solaire de la légende pour cette année, avoir l'honneur d'être possédé par l'esprit du Dieu-Cornu et passer par toutes les villes de l'Etat féconder les jeunes vierges choisies par l'ordre pour porter son enfant avant de finir son périple face à la Grande Prêtresse elle-même... hein c'est ça ?
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